Enceintes acoustiques à pavillon

Bien avant l’existence de l’amplification par l’électronique, il était d’usage, dans nos campagnes, d’appeler une personne située au loin en mettant ses deux mains de part et d’autre de la bouche; sans le savoir, on avait instinctivement utilisé une forme de pavillon primitive.
Lorsque M.Edison a créé son reproducteur de sons gravés dans la cire, son appareil était muni d’un pavillon cônique qui amplifiait les vibrations ténues fournies par l’aiguille qui suivait le sillon gravé.(n’oublions pas que M.Edison n’a pas été le premier à enregistrer du son, M. Edouard-Léon Scott de Martinville, l’a précédé de quelques années, mais lui, n’utilisait pas de pavillon.)

Après l’age d’or du grammophone et des autres systèmes de lecture dans la cire gravée, pour lesquels les pavillons ont été utilisés de façon quasi générale; ceux ci sont alors tombés en désuétude à cause de leur encombrement très souvent important, et de leurs difficultés de réalisation nécessitant une main d’œuvre amenant à des prix prohibitifs, entrainant ainsi des prix de vente les mettant bien souvent hors de la portée de la bourse des audiophiles ordinaires (dont je fais parti…).
De plus, l’arrivée du tube à vide a permis de réaliser l’amplification telle que nous la connaissons à ce jour.

Les enceintes à pavillon couvrant toute la gamme des fréquences audibles sont rares, et , les quelques heureux propriétaires de ces ensembles sont unanimes en ce qui concerne leur rendement ainsi que le rendu sonore.

Si, comme beaucoup d’audiophiles (et, je n’ai pas dis « idiophiles »…), vous êtes comme moi, c’est à dire insuffisamment argenté pour acheter ces systèmes de légende, mais, suffisamment passionné pour vouloir absolument en posséder un chez vous, il ne vous reste plus qu’a envisager de retrousser vos manches et passer à la construction personnelle.

Il existe, sur le sujet, toute une littérature spécialisée, parfois difficile à se procurer, et présentant souvent un aspect plutôt rébarbatif pour le constructeur amateur, car, ou le sujet est abordé par un physicien qui fait un large usage de mathématiques que la grande majorité des mélomanes ne pratique plus (voire, n’a jamais pratiqué), ou bien il s’agit d’un article d’application utilisant des transducteurs exotiques, traitant du travail du bois ou de maçonnerie pure ou dans lequel l’empirisme l’emporte sur la rigueur, de ce fait l’extrapolation pour d’autres haut-parleurs devient hasardeuse.
Il convient également d’éviter les publications qui ne font appel qu’à l’aspect subjectif; je suis assez effaré des bêtises qui peuvent être écrites dans ces analyses purement subjectives, et je rejoins, le point de vue de M.Douglas Self à ce sujet (lire absolument son ouvrage intitulé « audio power amplifier design handbook »).

En fait, de toute la littérature que j’ai pu consulter, les articles les plus récents dont j’ai tiré profit sont, d’une part, la série d’articles de M. J. Dinsdale paru dans Wireless World (numéros de Mars, Mai et Juin 1974) ainsi qu’un article de M. Jérome Prévot paru dans L’Audiophile N°31 série 2 de Janvier 1995, malheureusement, cet article devait faire l’objet d’une suite qui n’est jamais parue du fait de la disparition de la publication (par contre on peut trouver la suite sur le site des frères Prévost), et d’autre part, les différents articles de M. Bruce C. Edgar parus dans Speaker Builder ainsi que les ouvrages généraux comme ceux de M. Pierre Loyez ou de M. Jean Hiraga qui m’ont été également utiles.
La liste complète des ouvrages qu’il m’a été permis de consulter est citée plus loin.

Principes de base

Les haut-parleurs à membrane sont des générateurs acoustiques présentant une impédance complexe, essentiellement réactive, dont la composante inductive principale, due à la masse de la membrane se trouve en série avec la composante capacitive que présente la compliance (inverse de la raideur) de la suspension de l’équipage mobile.
De façon à obtenir un transfert d’énergie optimum, il serait nécessaire que la charge soit résistive et de valeur équivalente à celle de la réactance du haut-parleur; le problème devient alors une simple adaptation entre la forte impédance présentée par le haut-parleur et la faible impédance de la pièce d’écoute.

Dans une enceinte classique, avec le haut-parleur monté en face avant d’un panneau quelconque, la membrane n’est pas couplée au mieux à la charge que présente la pièce d’écoute, et , la réponse en fréquence est altérée par la pièce elle même.
Le pavillon est un tampon qui agit en adaptateur d’impédance entre la faible pression de l’air ambiant de la pièce d’écoute et le haut-parleur, générateur de fortes pressions; monté ainsi, le haut-parleur est correctement chargé dans la gamme de fréquences pour laquelle il est prévu.
Concrètement, le haut-parleur est chargé par une cavité dans laquelle il exerce des pressions importantes, cette cavité est relié au pavillon au moyen d’une ouverture sur laquelle le pavillon est raccordé par son extrémité la plus petite (qu’on appelle « gorge »), le pavillon réalise progressivement l’adaptation entre la cavité (milieu à forte pression) et l’ambiance de la pièce d’écoute.

Historique

Les premières études théoriques datent de 1878, et ont été faites par Lord Raleigh qui a analysé la transmission des ondes acoustiques dans des tuyaux de section variable.
La première application industrielle à grande diffusion fut l’utilisation d’un pavillon cônique sur les premiers grammophones du genre de « his master voice » , celui très connu, avec Nipper, le petit chien noir et blanc.
L’aiguille transmettait les vibrations générées par son passage dans le sillon gravé dans la cire à une membrane, celle-ci résonnait dans un volume sur lequel était raccordé le pavillon.

Il y eut ensuite d’autres études, très nombreuses, ainsi qu’une grande quantité d’applications pratiques; les pavillons pour grammophone obéissant à des lois d’expansion allant du cônique à l’hyperbolique, en passant par l’exponentiel, sans compter sur les expansions obéissant à des lois bien particulières comme, par exemple le Tractrix.
Les études les plus connues, jusqu’en 1930, furent celles de Webster, de Webb, et de Voigt.

les applications ont été diverses et vont du pavillon métallique de section droite circulaire à progression cônique ou exponentielle, au pavillon en bois replié sur lui même, de façon a rentrer dans un meuble de salon dont on ouvre les portes dès lors qu’on désire écouter un disque…

Avec l’arrivée du haut-parleur électrodynamique à membrane, vers 1925, ainsi que de l’amplification par tubes à vide, les anciennes études ont été reconduites et adaptées à ces nouveaux produits, car, les tubes de l’époque ne permettaient pas d’obtenir des puissances importantes , du moins pour des utilisations domestiques, de plus, l’avènement du cinéma sonorisé a conduit les techniciens de l’époque a persévérer dans ce sens.

De nombreux types de haut-parleurs ont été réalisés et étaient chargés par des pavillons, en utilisant la même technique, a savoir que la membrane est chargée par un volume sur lequel est raccordé le pavillon. Les haut- parleurs de l’époque ne possédaient pas d’aimant permanent, mais étaient munis d’un électro-aimant, certainement du fait que les aimants permanents de l’époque étaient peu performants et très chers.

Ce n’est qu’à partir de la seconde guerre mondiale que le Bass-reflex et autres systêmes de charges ont pris le pas sur l’enceinte à pavillon, pour des raison de facilité de fabrication, d’encombrement, et de coût, et surtout parce que l’amplification permettait des puissances supérieures avec les tubes modernes développés pendant le conflit.

Seuls quelques acharnés comme Klipsch aux Etats-Unis, ou Voigt(Lowther) et Fountain(Tannoy) en Grande Bretagne ont persisté dans la voie de l’enceinte à pavillon, avec une réussite sans égal, au grand bonheur des audiophiles.
Depuis quelques années, de nombreux mélomanes, à la recherche de la perfection, s’intéressent de nouveau aux enceintes à pavillon.